Cette série d’articles consacrée à l’entreprise du céramiste Émile Muller à Ivry donne un aperçu de ses créations dans le domaine de l’Art nouveau. Dans ce troisième article, puis dans le prochain, nous tentons de cerner la collaboration entre Muller & Cie et Hector Guimard.
Nos articles ne présenteront pas tous les dessins de céramique architecturale de Guimard connus et destinés à Muller & Cie ni toutes les occurrences d’utilisation de ses panneaux décoratifs par d’autres architectes. Cette étude exhaustive est menée parallèlement pour la constitution d’un répertoire spécifique.
Hector Guimard est un cas particulier parmi les architectes modernes qui fournissent des modèles à Muller & Cie puisqu’il fait appel à la Grande Tuilerie d’Ivry pour le décor de ses premières villas construites dans l’ouest parisien dès le début des années 1890. Ces commandes débouchent immédiatement sur l’édition de modèles. Mais curieusement, dès la construction du Castel Béranger en 1895-1898, Guimard ne semble plus passer commande à Muller & Cie et s’adresse alors à Gilardoni & Brault et à Alexandre Bigot. Presqu’une décennie plus tard, 14 de ses modèles continuent cependant de figurer au catalogue n° 2 de Muller & Cie de 1904.
Dès sa première construction connue, un modeste pavillon vantant les méthodes thérapeutiques de l’électricité et de l’électromagnétisme[1] pour un obscur Ferdinand de Boyères à l’Exposition universelle de 1889, Guimard utilise la céramique[2] en décor des panneaux insérés dans la menuiserie. La revue professionnelle La Construction Moderne du 22 mars 1890 en donne une gravure (sans doute d’après photo) mais nous ignorons quels ont été les modèles de céramiques utilisés et quel en a été le fournisseur.
Le « Pavillon de l’application de l’électricité à la médecine » de Guimard à l’Exposition universelle de 1889. Illustration par Henri Toussaint parue dans La Construction Moderne du 22 mars 1890. Les décors céramiques se trouvent sur le soubassement ainsi que sur les panneaux séparant les fenêtres. Site Gallica BNF.
L’hôtel Roszé
Deux ans plus tard, en 1891, pour l’hôtel Roszé au 34 rue Boileau dans le XVIe arrondissement, nous avons la certitude d’une véritable collaboration entre Guimard et Muller & Cie grâce à la présence de plusieurs panneaux de l’hôtel sur le catalogue n° 2 de 1904. À cette époque, Guimard n’a que 24 ans et il est loin d’avoir la notoriété qui sera la sienne à partir du Castel Béranger. La nouveauté de ses modèles qui nous semble actuellement moins évidente, doit pourtant être alors suffisante pour que Louis d’Émile Muller pressente que ce jeune architecte mérite l’attention.
Construit contre un mitoyen du côté droit, l’hôtel comprend trois façades, actuellement difficilement lisibles de la rue en raison de la palissade et de l’envahissement par les glycines.
L’hôtel Roszé, 34 rue Boileau à Paris, cliché pris en 1975. À cette époque les panneaux de céramique présents sur la façade avant et la façade arrière sont masqués par une couche de peinture. © Bildarchiv Foto Marburg. Droits réservés.
En façade sur rue, sur la travée de gauche, les frises placées de part et d’autre du linteau[3] de la fenêtre du premier étage sont revêtues de panneaux en quatre éléments figurant une branche d’où sortent alternativement une fleur bleue et une fleur blanche.
Cette série d’articles consacrés à l’entreprise du céramiste Émile Muller à Ivry donne un aperçu de ses créations dans le domaine de l’Art nouveau. Le premier article résumait l’historique de l’entreprise. Dans ce second article nous abordons plus précisément les collaborations avec les artistes et les architectes de ce mouvement artistique. Les troisième et quatrième article s’intéresseront aux éditions de modèles d’Hector Guimard chez Muller & Cie et le cinquième au secteur des cheminées.
Après le décès d’Émile Muller en 1889 au lendemain de l’Exposition universelle, la direction de l’entreprise échoit à son fils Louis d’Émile Muller. Ce dernier développe un secteur artistique en éditant des artistes contemporains et en intensifiant les relations avec les architectes pour la création de nouveaux modèles qui seront édités ou non.
L’hôtel particulier dit La Pagode édifié dans un style japonais en 1895-1896 par l’architecte Alexandre Marcel pour le directeur du Bon Marché, au 57 rue de Babylone à Paris, en est un bon exemple. Seule une partie du décor en grès émaillé se retrouve sur le catalogue.
Deux panneaux du décor de La Pagode, architecte Alexandre Marcel, 1895-1896, 57 rue de Babylone, Paris. Catalogue Muler et Cie n° 2, 1904, pl. 15. Coll. part. Chaque panneau : 12 kg ; terre cuite rouge ou blanche : 15 F-or ; terre cuite émaillée : 30 F-or ; grès non émaillé : 20 F-or ; grès émaillé : 40 F-or.
Parmi les jeunes créateurs qui entrent en relation avec Muller & Cie, beaucoup vont participer de près ou de loin au mouvement artistique de l’Art nouveau, tourné vers l’art décoratif et l’architecture. Leur travail va générer un grand nombre de nouveaux modèles qui sont susceptibles pour certains d’être réemployés par d’autres. Il est donc essentiel pour une entreprise telle que la Grande Tuilerie d’Ivry de se maintenir au goût du jour et de pouvoir fournir sans retard ceux des architectes, entrepreneurs et décorateurs qui ne sont pas eux-mêmes des créateurs mais qui désirent donner à leur travail un aspect moderne. Les catalogues Muller & Cie vont donc intégrer un nombre conséquent de modèles de style Art nouveau.
Le catalogue n° 1 qui comprend les matériaux de construction avec les briques et les tuiles, s’enrichit de modèles dans lesquels l’Art nouveau fait une apparition discrète à la planche 33 avec deux modèles de tuiles de rives et frontons qui encadrent un modèle plus traditionnel néo-Renaissance. Il s’agit de modèles non signés par un architecte et qui ont donc été achetés à un artiste industriel anonyme.
Tuiles de rives du catalogue Muller & Cie n° 1, pl. 33. 1903. Reproduction d’après La Céramique architecturale à travers les catalogues des fabricants, p. 167.
Nous nous appuierons plus volontiers sur le pléthorique catalogue n° 2 de 1904, essentiellement consacré aux produits destinés au décor architectural extérieur et intérieur, mais qui comprend aussi des vases, des objets d’art et des bibelots. On y retrouve de nombreux artistes connus et parmi ceux qui travailleront dans le courant de l’Art nouveau on peut citer les sculpteurs Pierre Roche, Ringel d’Illzach, Jean Dampt, Timoléon Guérin ou Louis Chalon.
Cette série d’articles consacrés à l’entreprise du céramiste Émile Muller à Ivry donne un aperçu de ses créations dans le domaine de l’Art nouveau. Dans ce premier article nous abordons l’historique de l’entreprise et la variété de ses créations. Un second article s’intéressera à la production de Muller dans le style Art nouveau, les troisième et quatrième articles aux éditions de modèles d’Hector Guimard et un cinquième au secteur des cheminées.
Émile Muller (1823-1889) est originaire d’Altkirch en Alsace, près de Mulhouse. Issu d’une famille aisée, il termine ses études à Paris en sortant diplômé de l’Ecole Centrale des Arts et Manufacture en 1844. Il en sera par la suite professeur de constructions civiles pendant 24 ans, à partir de 1864.
Portrait d’Émile Muller. Centre de documentation de l’École Centrale Paris. Droits réservés.
Son implication dans le domaine de l’enseignement se manifeste aussi par sa participation à la fondation de l’École Spéciale d’Architecture[1] et de l’École libre des Sciences Politiques (actuelle Sciences-Po). Il préside également la Société des ingénieurs civils où il aura Gustave Eiffel comme successeur. Animé d’idées sociales, après avoir construit plusieurs équipement publics, Émile Muller réalise une cité ouvrière à Mulhouse en 1853, première expérience française de logements familiaux décents avec jardinets. Il s’engage aussi dans les protections des ouvriers contre les accidents de travail.
L’année suivante, en 1854, Émile Muller fonde une société de fabrication de tuiles à Mulhouse puis quelques mois plus tard achète un grand terrain pour fonder la Grande Tuilerie d’Ivry, située en bord de Seine, sur la route nationale Paris-Bâle, à proximité de carrières d’argile de la banlieue sud de Paris. Une salle d’exposition et de vente sera ouverte à une date que nous ne connaissons pas mais sans doute très postérieure, à une adresse plus prestigieuse : 3 rue Halévy, près de l’Opéra de Paris.
Vue générale de la Grande Tuilerie d’Ivry. La façade de l’usine sur la route, face à la Seine, est du côté gauche. Catalogue Muller & Cie n° 2, 1904, p. 1. Coll. part.
L’usine produit tout d’abord des tuiles à emboîtement selon le procédé breveté par les frères Gilardoni, eux aussi originaires d’Altkirch.
Tuiles à emboîtement. Catalogue Muller & Cie n° 1, 1895-1896. Coll. Bibliothèque des Arts décoratifs.
Les accessoires de toitures tiennent une part importante de la production car ils permettent de personnaliser un bâtiment. Plusieurs architectes sont donc à l’origine d’un certains nombre de modèles spéciaux qui peuvent ensuite être édités.
Modèles de faîtières. Catalogue Muller & Cie n° 1, 1895-1896, pl. 12. Coll. Bibliothèque des Arts décoratifs.
Après le démarrage de la fabrication de produits émaillés en 1866, la Grande Tuilerie d’Ivry diversifie ses activités en produisant des briques brutes et émaillées et des décors de façade en terre cuite, brute ou émaillée. Leur composition permet une cuisson à haute température les rendant imperméables.
Briques émaillées Muller sur une entrée d’immeuble, 10 rue de la Croix Faubin à Paris. Photo auteur.
En 1871-1872, Muller fournit son premier décor architectural d’envergure pour le moulin de la chocolaterie Menier à Noisiel, premier bâtiment à structure métallique portante au monde, dû à l’architecte Jules Saulnier.
Moulin de la chocolaterie Menier à Noisiel, Jules Saulnier architecte, 1871. Photo internet. Droits réservés.
Peu après, en 1875, l’usine compte 150 ouvriers. Muller est bien sûr présent aux Expositions universelles, celle de 1867 et celle de 1878 où il assure le succès de la céramique architecturale. À l’Exposition universelle de 1889, les dômes des palais des Beaux-Arts et des Arts libéraux parés de ses tuiles émaillées bleu turquoise font sensation.
Exposition universelle de 1889, palais des Beaux-Arts, architecte Formigé, dôme en tuiles émaillées bleu turquoise par Muller. Photo National Gallery of Art, Washington. Droits réservés.
Il y présente également pour la première fois des grès émaillés. La reproduction de la Frise des archers[2] du palais de Darius 1er à Suse (Perse), entreprise en grès émaillé pour cette exposition, ne sera pas achevée à temps et ne sera finalement exposée qu’en 1893 à l’Exposition universelle de Chicago. Quant à la reproduction par Muller de la Frise des lions issus du même palais de Darius 1er, elle se fera au Salon des Artistes Français en 1896. Entre temps, ces deux thèmes auront été mêlés et complétés par des colonnes et des jardinières pour le décor du jardin d’hiver d’un hôtel particulier en 1893, décor ensuite proposé sur catalogue et facturé au nombre d’archers demandé.
Frises des archers, d’après la frise du palais de Darius 1er à Suse (Perse) du musée du Louvre. Vestibule de l’immeuble 11 rue des Sablons à Paris. Photo auteur.
C’est à l’issue de l’exposition qu’Émile Muller décède le 11 novembre 1889. Son fils Louis (1855-1921), dit Louis d’Émile, lui succède alors à la direction de la société dont le nom devient « Émile Muller & Cie ». Tout en conservant la production de briques émaillées et de tuiles mécaniques de la Grande Tuilerie d’Ivry, Louis d’Émile Muller lui ouvre de nouveaux domaines d’exploitations.
La bonne compréhension de cet article nécessite la lecture préalable des deux articles précédents. Le premier traite du faux entourage de métro vendu par Bonhams à New York en 2019 et le second des autres faux entourages en bronze connus aux Etats-Unis.
Rappelons que Guimard ne travaille pour la CMP[1] que de 1900 à 1902. À partir de 1903, la compagnie utilise ses modèles pour équiper des accès de différentes largeurs avec des entourages découverts à fond orthogonal ainsi que des accès secondaires dont les derniers sont mis en place en 1922. En tout, 167 ouvrages Guimard seront créés[2]. En 1908 on enregistre la première suppression d’un accès. Épisodiques dans les années vingt, les démontages d’accès Guimard se multiplient ensuite et leur nombre enregistre un premier pic dans les années 30. Après la coupure de la Seconde Guerre mondiale et la reprise de la CMP par la RATP en 1945, les suppressions reprennent lentement dans les années 50 pour monter en flèche dans les années 60. Un premier arrêté de protection à l’ISMH en 1965 ne concerne qu’un petit nombre d’accès et il faudra attendre 1978 pour qu’une protection totale leur soit enfin offerte. À cette date, 79 accès Guimard ont été démontés. Parmi les entourages découverts subsistants, bon nombre ont vu leur portique fragilisé être remplacé par un candélabre Dervaux. En l’absence de pièces en stock issues de la récupération sur les ouvrages Guimard démontés depuis des décennies, l’entretien des accès subsistants nécessite dès 1976 la commande de nouvelles pièces réalisées par surmoulage à la fonderie GHM. Ce procédé induit un léger rétrécissement de ces copies en raison du retrait du métal lors du refroidissement qui suit la coulée. À partir de 1983, des fontes de nouvelle génération sont produites aux dimensions exactes grâce à la création de nouveaux modèles en aluminium moulé. C’est finalement en 2000 que la RATP réalise une campagne de restauration complète des accès Guimard, leur redonnant l’aspect qu’ils présentent aujourd’hui.
État de l’entourage de la station Europe avant les restaurations de l’an 2000. Le portique a été abattu et remplacé par un candélabre Dervaux à gauche. Photo RATP. Droits réservés.
État de l’entourage de la station Europe après les restaurations de l’an 2000. Le portique a été rétabli au moyen d’une copie fournie par la fonderie GHM et d’une nouvelle enseigne en lave émaillée fournie par la société Pyrolave. Photo auteur.
Les caractéristiques communes des faux entourages en bronze
Toutes les copies d’entourages en bronze dont il a été question dans nos deux articles précédents (nous en excluons celui de la National Gallery of Art de Washington) présentent de fortes similitudes entre elles. Ces entourages ne comprennent jamais de pierre de socle d’origine. Il s’agit toujours d’entourages découverts à fond orthogonal et jamais de fond arrondi[3]. Si le nombre de modules en longueur est variable et parfois incomplet, le nombre de modules en largeur est toujours de trois — configuration la plus courante sur le réseau parisien — ce qui correspond à une trémie d’environ trois mètres et permet de déterminer une largeur de porte-enseigne. La partie supérieure du porte-enseigne de ces entourages a une forme légèrement arrondie sur laquelle nous reviendrons plus loin mais qui détermine une augmentation de la hauteur de l’enseigne. Ces entourages ne comportent d’ailleurs jamais d’enseigne d’origine (qu’elle soit en lave émaillée ou en tôle rouge à lettres pochoir) ce que l’on serait en droit d’attendre du démontage d’un entourage ancien. Dans deux cas l’enseigne est en tôle peinte avec un lettrage discordant (tôle rouge avec lettrage blanc type édicule grand M pour Toledo ; tôle jaune avec lettrage vert entourage grand M comprimé pour la vente Phillips à New York). Pour l’entourage de Houston il s’agit de deux plaques d’un alliage de cuivre, peintes et rivetées sur un pourtour en fer avec un lettrage entourage grand M correct mais approximatif. Dans le cas de la vente Bonhams l’enseigne est tout simplement manquante.
Les photos détaillées fournies par la maison de vente Bonhams nous ont montré l’aspect initial de la mise en peinture de ces faux entourages.
Détail du pilier et de l’arche droits de l’entourage de la vente Bonham à New York en 2019. Photo Bonhams.
Mais une étude plus précise est fournie par le rapport d’état de l’entourage de Houston rédigé par Steven L. Pine en 2002. Il mentionne une première couche d’accrochage couleur terre de Sienne brûlée posée sur le bronze, puis l’utilisation concomitante d’une peinture vert de chrome foncé et d’une peinture blanche pour les reliefs. Cette première mise en peinture est sans doute celle qui a prévalu pour la plupart des faux entourages en bronze puisque nous la retrouvons à peu de chose près sur le potelet d’angle de la vente Chayette & Cheval en 2019. Les faussaires n’ont pas poussé l’abnégation jusqu’à multiplier les repeints alors que les éléments anciens du métro de Paris ont subi au fil des ans de multiples mises en peinture avant leur restauration en 2000 où ils ont été décapés et repeints[4]. Pour les entourages de Toledo et Houston, exposés en extérieur, une nouvelle mise en peinture plus récente a été réalisée. Celui de Houston est recouvert par une peinture époxy verte rehaussée de blanc sur les reliefs.
Pourquoi le bronze ?
L’entourage découvert de métro en bronze vendu en 2019 par Bonhams à New York était en réalité le quatrième faux entourage de cette nature dont nous avons été informé et qui tous sont présents sur le territoire américain. Nous les présentons ci-dessous dans l’ordre dans lequel ils sont venus à notre connaissance mais qui n’est pas l’ordre chronologique dans lequel ils ont été fabriqués et vendus.
Vente Phillips à New York
La première copie en bronze est un entourage découvert incomplet comprenant un portique et seulement neuf modules. Il a été vendu le 24 mai 2007 par la maison de vente Phillips à New York sur Liveauctioneers. Estimé de 450 000 à 550 000 $, il a été adjugé 340 000 $[1]. À cette époque nous ignorions que ses pièces modelées étaient en bronze.
Entourage découvert comprenant neuf modules vendu à New York par Phillips Live Auctioneers le 24 mai 2007. Photo internet. Droits réservés.
Nous pensions l’avoir perdu de vue quand nous est récemment parvenue la photo ci-dessous, prise au Driehaus Museum à Chicago.
Cette série de trois articles développe un aspect traité dans le livre Guimard L’Art nouveau du métro, paru en 2012 aux éditions La Vie du Rail. Nous y utilisons les termes d’entourages « anciens » ou « authentiques » du métro de Paris, de « copies » et de « faux » que nous devons tout d’abord expliciter. Nous considérons comme « authentiques » ou « anciens » les entourages et édicules du métro de Paris dont les éléments ont été édités d’après les modèles de Guimard depuis la création du métro en 1900 jusqu’au lendemain de la Première Guerre mondiale en 1922. Cependant les accès de métro Guimard actuellement présents sur le réseau parisien ne sont qu’en partie authentiques car bon nombre d’entre eux ont subi à partir de 1976 des restaurations plus ou moins complètes où des éléments disparus ont été remplacés par des copies. Celles-ci ont été rééditées tout d’abord par surmoulage, puis avec de nouveaux moules aux dimensions exactes. C’est avec ces copies d’éléments qu’au cours de ces dernières années la RATP a fourni des entourages complets aux compagnies de métro de différentes villes étrangères (Lisbonne, Mexico, Chicago et Moscou). Il s’agit là de copies d’entourages, mais pas de « faux » au sens légal du terme puisqu’il n’a jamais été question de les faire passer pour des entourages anciens de Paris. En revanche, nous allons nous intéresser à une série de copies d’entourages qui sont des faux car ils ont été créés avec l’intention de les vendre comme authentiques.
En mars 2019 nous avons été contacté par la représentante en France de la filière américaine d’une maison de ventes aux enchères britannique bien connue : Bonhams. Elle nous proposait de nous prononcer sur un « exceptionnel ensemble de Guimard » et d’en rédiger la notice de présentation pour sa vente prévue en juin 2019 à New York. Pressentant de quoi il pouvait être question et contrairement à nos habitudes, nous avons répondu favorablement à cette demande. Nous avons alors eu confirmation qu’il s’agissait bien d’un nouvel entourage de métro parisien qui se vendait aux États-Unis…
Portique de l’entourage de métro vendu par Bonhams New York en juin 2019. Photo Bonhams.
Section de balustrade de l’entourage de métro vendu par Bonhams New York en juin 2019. Photo Bonhams.
Comme nous commençons à avoir une certaine expérience des « nouveaux-entourages-de-métro-parisien-se-vendant-aux-États-Unis » et sans encore dévoiler nos batteries, nous avons aussitôt demandé des précisions à Bonhams New York.
Le premier élément que nous avons voulu éclaircir était la nature du métal employé pour les pièces modelées de l’entourage. Comme nous nous y attendions, il nous a été répondu qu’elles étaient en bronze. Ce simple fait impliquait à lui seul que ces pièces avaient été surmoulées et coulées dans un matériau autre que les pièces originales [1] et que l’entourage était donc une copie.
Nous avons aussi demandé des photographies supplémentaires, ciblées sur des points où nous étions à peu près sûr de trouver matière à faire des commentaires. Les clichés qui nous ont été fournis confirmaient l’hypothèse d’une copie en montrant que certaines pièces modelées présentaient un aspect discordant avec celui qu’elles auraient dû avoir et que leur assemblage souffrait d’erreurs et d’approximations.
En plus des photos demandées, la maison Bonhams nous a fourni deux documents :
Afin de faciliter la description d’un entourage découvert, nous rappelons ci-dessous les noms que nous avons attribués à ses éléments constitutifs :
1- piliers (fonte).
2- arches (fonte).
3- porte-enseigne supérieur (fonte).
4- porte-enseigne inférieur (fonte).
5- étriers (fonte).
6- casques (fonte).
7- cimiers (fonte).
8- verrines de signalisation (originellement en verre soufflé-moulé) puis remplacées par des globes de signalisation (matériau de synthèse moulé).
Éléments constitutifs d’un entourage découvert du métro de Paris par Guimard. Dessin auteur.
9- écussons (fonte).
10- arceaux (fonte).
11- potelets de milieu (fonte).
12- potelets d’angle (fonte).
13- flammes (fers en U en acier laminé, découpés et pliés aux extrémités).
14- fers (fers en U en acier laminé).
15 & 16- lames (barres en acier laminé).
17- pierres de socle (Comblanchien).
18- enseigne (lave émaillée).
Éléments constitutifs d’un entourage découvert du métro de Paris par Guimard. Dessin auteur.
Nous avons donc envoyé à la maison de vente Bonhams l’argumentaire suivant :
Après avoir fait sa connaissance il y a deux ans lors d’une visite privée de l’hôtel Mezzara, c’est avec plaisir que nous avons retrouvé Nupur Tron à la galerie Aveline, place Beauvau à Paris, le 21 novembre en fin d’après-midi, pour la présentation de son livre consacré à la maison Frison de Victor Horta.
Après l’actualité passée sur notre site le 12 novembre, plusieurs adhérents du Cercle Guimard étaient également présents et ont pu profiter de la somptuosité de l’exposition L’Apothéose du génie présentée par la galerie et qui regroupe un ensemble exceptionnel de chefs-d’œuvre d’art décoratif qui ont figuré aux Expositions universelles[1].
Nupur Tron s’est passionnée pour l’Art nouveau lorsqu’elle a fait l’acquisition en 2017 de la maison Frison à Bruxelles. Depuis, elle a entrepris de compléter sa restauration et « de rétablir cette maison dans toute sa gloire ». Elle y habite d’ailleurs, ce qui en fait « la seule maison de Horta dans laquelle on vit aujourd’hui. » Pour soutenir son initiative, elle a créé la Fondation Frison Horta qui gère cette restauration et s’emploie à faire connaître et apprécier cette maison magnifique que nous projetons d’aller bientôt visiter.
Pour faire connaître ce lieu merveilleux et pour partager son engagement, elle vient de publier un livre consacré à la maison[2]. Écrit en anglais et en français, plus qu’un livre d’historien d’art, cet ouvrage est bien celui d’une enthousiaste et d’une personnalité passionnée par les arts.
[1] Cette très belle exposition est prolongée pendant quelques semaines.
[2] 128 pages, format 23 x17 cm, 30 €, éditions Sterck & Vreese, 2019, ISNB 978 90 5615 5438.
Paris – Galerie Aveline
Jeudi 21 novembre 2019
En 2017, Nupur Tron tombe sous le charme de l’hôtel Frison. Elle fait l’acquisition de cet hôtel particulier de six étages dessiné par Victor Horta en 1894 et situé au 37 de la rue Lebeau à Bruxelles. Avec une énergie et une détermination incroyable, elle entreprend à ses frais d’importants travaux pour retrouver son décor d’époque et révéler le lieu.
Afin d’accompagner ce projet, Nupur Tron crée en 2018 la Foundation Frison Horta avec la volonté d’ouvrir le lieu à de nombreuses manifestations dans un esprit d’échange et de partage. Son plus grand souhait : établir des ponts culturels entre l’Ouest et l’Est, en particulier avec son pays natal – l’Inde.
Jeudi 21 novembre, Nupur Tron sera accueillie par La Galerie Aveline, place Beauvau, pour la signature de son livre consacré à l’hôtel Frison. L’occasion est aussi de découvrir l’exposition « L’Apothéose du Génie » – une collection privée de 250 objets inédits provenant de l’Exposition Universelle de 1900 à Paris et appartenant à la Galerie Neuse.
Le Cercle Guimard soutient fortement le travail et les initiatives de Nupur Tron. Sa liberté, son dynamisme et ses initiatives apportent un souffle rafraichissant pour la promotion de l’Art nouveau.
N’hésitez pas à venir nombreux à sa rencontre.
https://foundation-frison-horta.be
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Vous pouvez prendre rendez-vous par courriel pour venir un vendredi après-midi ou un samedi matin. Dans ce cas, le règlement en espèces est possible.
Vous pouvez réaliser un règlement unique comprenant l’achat et la cotisation.